Les 82 printemps d'un poète
Bonjour,
J'ai un papa un peu farfelu, il est, tout à la fois, collectionneur de porte-clés, excellent joueur à la pétanque, dénicheur de vieilles souches, qu'il réveille sous les traits d'animaux, comme pour mieux retrouver ses propres racines; il est amoureux des mots et de la belle écriture, qu'il utilise dans ses nouvelles, ses poèmes ou sa biographie, où il aime raconter le souvenir des petites gens d'avant, du monde paysan dont il est issu; il est aussi ciseleur de bois de lierre, grand admirateur de la nature, passionné de fabrications artisanales comme celle de son fameux vinaigre et de son vin travaillé à l'ancienne à partir de vignes parties dans la sauvagerie, grand économe et surtout grand gourmand de crêpes!
Aujourd'hui, à l'occasion de son 82ème anniversaire, je voulais lui rendre hommage en vous présentant l'un de ses poèmes que j'aime tant, un poème sur ma colline natale, mon Pujols:
Soir de juillet à Pujols
Quand sur le mont Pujols, se glisse l'heure grise,
Et que l'astre enflammé retombe dans l'oubli,
Le couchant se pare alors d'une palette exquise
De plus de cent couleurs, dans l'azur embelli.
Quand la nuit et le jour, oubliant leurs rancoeurs,
D'un pacte millénaire, et toujours solennel
Se donnent rendez-vous, sans aucune pudeur
Enjolivant l'instant d'une douceur de miel.
C'est le parfum doré s'exhalant des éteules
Qu'un lutin malicieux a soufflé jusqu'ici
Cueilli aux épis d'or, au mitan d'une meule
Dans le flamboiement d'été, à cette heure adoucie.
Odeurs de pailles chaudes, meurtries dans les andains
Senteurs crépusculaires que nulle nuit n'efface
Quand sonne l'Angélus, syllabes de l'airain
S'envolant sur les toits, jusqu'au lointain espace.
Du bourreau de la Fontaine jusqu'aux lilas du Bois
Longue vue sur la ville, s'éclairant à moitié
Le temps s'est arrêté, mon cousin n'est pas roi
Et je retiens mon souffle d'un rien d'éternité.
Et dans l'Ether des cieux où rôde le néant
S'allume, par milliers, la moisson des clous d'or
Que la Lune accompagne armée de son croissant
Veillant sur la campagne et Pujols qui s'endort.
Raymond Jolit,
Juillet 2009.
("La Fontaine du bourreau" et "Le Bois des lilas" sont des lieux-dits de Pujols)
J'ai un papa un peu farfelu et j'en suis fière!
A très bientôt.